Invasion à limousine!? {Libre}

Lunettes de soleil au nez, ses cheveux soyeux rebondissant sur ses épaules en suivant le rythme de ses pas, Shaylee avançait vers la sortie. Sa démarche gracieuse et assurée ne manquait pas de faire retourner de nombreuses têtes sur son passage. Elle était belle et elle le savait. Elle le savait trop bien même et n'hésitait pas à user de ses charmes pour arriver à ses fins lorsque cela s'avérait nécessaire. Elle s'arrêta brusquement en arrivant au bout du couloir, là où aurait dû se trouver le chauffeur qui devait la raccompagner à son hôtel. Pourtant Richard lui avait bien dit qu'il viendrait la chercher à cet endroit. Elle lui avait toujours fait confiance et il ne l'avait encore jamais déçu. Il était habitué aux petites escapades que s'offrait Shaylee de temps à autre et la jeune Américaine était plus qu'habituée à le voir bien droit devant le petit muret où elle se trouvait à l'instant même. Lentement, elle explora les alentours, peut-être était-il allé lui acheter un café? Négatif, il ne semblait être nulle part. Shaylee jeta un coup d'œil à sa montre qui indiquait pourtant qu'il était près de 15h30; son vol avait eu un peu de retard en raison de mauvaises conditions météorologiques.

Déterminée à sortir d'ici le plus rapidement possible, Shaylee se dirigea vers la sortie, la tête plongée dans son sac à main. Mais où était donc ce foutu portable? Et où Richard pouvait-il bien être? La jeune femme avançait toujours de sa démarche assurée, ne se préoccupant pas des autres autour d'elle. Ils n'avaient qu'à faire attention à l'endroit où ils poseraient les pieds et souhaitons-leur que ce ne serait pas à l'endroit même où elle poserait les siens. Elle ne releva même pas la tête pour sortir. Elle aurait bien pu se frapper la tête contre la porte direz-vous, mais elle savait pertinemment qu'un gentil gentleman lui ouvrirait la porte. On lui ouvrait toujours la porte et cette fois-ci n'avait pas fait exception à la règle.

Dehors la pluie tombait si intensément qu’on aurait facilement pu boire debout. D’énormes nuages noirs couvraient le ciel, laissant présager qu’il y aurait bientôt un orage. Shaylee ne s’en était même pas aperçu avant de relever la tête de son sac à main. Bien à l’abri sous un petit toit, elle détonnait un peu avec ses lunettes de soleil. Certains la regardaient simplement pour le plaisir de leurs yeux, d’autres – toutes des femmes – la regardaient comme si elle venait d’une autre planète. Jalousie quand tu nous tiens…, mais Shaylee ne s’en préoccupait pas. Elle aimait être remarquée. Son portable dans la main, elle composa le numéro de son chauffeur qui n’était toujours pas là.

RICHARD – Mademoiselle Williams?
SHAYLEE – Richard? Non, mais que faites-vous bon sang? Je vous attends depuis au moins 45 minutes!

En effet, elle avait tendance à un peu exagérer les faits…

RICHARD – Je suis désolée mademoiselle pour tous ces inconvénients, mais la circulation est affreuse en ville. Il y a eu un accident et je suis coincé ici.
SHAYLEE – Vous êtes coincé…
INCONNU – Shaylee, c’est toi?

La jeune femme jeta un bref regard en direction de la voix. Il n’en fallu pas plus pour que son sang se fige dans ses veines. Ah non… pas lui, pensa-t-elle. C’était l’un de ses anciens petits amis et, ces derniers temps, il était très… collant. Elle n’arrivait plus à le supporter; elle devait l’éviter, mais comment faire? Elle était coincée ici jusqu’à ce que Richard n’arrive et, selon ce qu’il disait, ce serait plutôt long. Les pensées défilaient à cent miles à l’heure dans sa tête, il fallait qu’elle trouve quelque chose.

SHAYLEE – Écoutez Richard, j’ai trouvé quelqu’un pour me ramener chez moi. Vous pouvez rentrer.

Murmura-t-elle rapidement avant de se précipiter vers une limousine qui était sur le point de partir. Le chauffeur venait tout juste d’appuyer sur l’accélérateur lorsque Shaylee ouvrit la portière. Déterminée à ne pas rester coincée plus longtemps ici, elle sauta à bord et s’installa sur la banquette, comme s’il avait été normal qu’elle se trouve là. Enfin, ce n’était pas ce que semblait penser l’occupant de la limousine. Du moins, c’est ce que son air surpris semblait suggérer…

Shaylee eut du mal à contrôler son envie de rire. Elle comprenait bien l'air de surprise qu'affichait l'occupant de la limousine, ça ne l'empêchait toutefois pas de trouver la situation plutôt cocasse. Il devait la prendre pour une folle, peut-être même qu'il demanderait à son chauffeur de la déposer à l'asile, mais elle ne s'en préoccupait pas. La seule chose qui comptait en ce moment était d'échapper à ce papier collant d'ex petit ami et cela, peu importe ce que ça impliquait.

En temps normal, elle ne se serait plus inquiétée maintenant qu'elle se trouvait dans la limousine. Toutefois, elle ne cherchait pas à éviter une personne normale; à vrai dire, elle s'imaginait bien son ex petit copain frapper dans la vitre de la limousine dans l'espoir de lui parler. Elle n'arrivait pas à croire qu'elle avait réussi à l'endurer pendant une semaine. Il fallait bien le lui accorder, il avait beaucoup de charme. Côté physique, il était impeccable, un vrai Dieu Grec. Cependant, les choses étaient quelque peu différentes lorsqu'on apprenait à mieux le connaître...

Même si, d'un point de vue général, elle semblait totalement normale, ses doigts tapotant contre son sac à main trahissaient légèrement sa nervosité. Mais qu'attendait-il pour démarrer!? Qu'elle ne sorte de la limousine, fort probablement, mais ce n'était pas dans ses intentions. Elle voulait seulement quitter l'aéroport. Pour aller où? N'importe où, du moment qu'il n'y était pas. Bien entendu, elle espérait avoir suffisamment de chance pour se retrouver au Caesar's Palace sans devoir rappeler Richard, mais elle ne voulait pas sauter d'étape. Il serait temps de réfléchir à cela plus tard, lorsqu'elle serait enfin loin d'ici.

Et voilà qu'elle avait affaire à un petit malin. Comment pouvait-on confondre une limousine et un taxi? L'un était infâme et petit, alors que l'autre était luxueux et grand. Inutile de préciser qu'elle préférait largement la deuxième option à la première. Elle le regardait, lui et son sourire moqueur; plus elle y pensait et plus elle avait l'impression de l'avoir déjà vu quelque part. Mais où? Elle avait rencontré tellement de monde dans sa vie qu'il était difficile de savoir où elle avait bien pu le voir.

SHAYLEE – En effet, j'avais bien cru remarquer ce petit détail. Mais je sais également que toute limousine qui se respecte est dotée d'un système permettant de verrouiller ses portières lorsqu'on ne désire pas avoir un peu de compagnie. Comme elles n'étaient pas verrouillées, je suppose que vous ne verrez pas de mal à avoir un peu de compagnie jusqu'au Caesar's Palace.

C'est en prononçant ses derniers mots qu'elle se souvint. C'était là qu'elle l'avait vu, au Caesar's Palace. Elle se souvenait l'avoir croisé quelques fois dans un couloir ou dans l'ascenseur lorsqu'elle se rendait à sa chambre. Ils n'avaient cependant jamais échangé un mot avant aujourd'hui; ou s'ils l'avaient, elle se trouvait dans un trop mauvais état pour s'en souvenir maintenant. Après quelques instants, Shaylee détacha son regard du sien. Elle se retourna sur son banc, laissant son regard se perdre à l'extérieur. Elle le voyait au long, son ex petit ami jouait des coudes pour tenter de se frayer un chemin dans la foule. Bien entendu qu'il l'avait. Et peut-être croyait-il qu'elle l'attendait, puisque la limousine ne démarrait toujours pas. Mais qu'attendait-il bon sang!?

SHAYLEE – En fait, n'importe où ira, Du moment que ce n'est pas ici et qu'il ne s'y trouve pas.

Elle ne regardait plus vers l'extérieur maintenant. Elle s'était bien réinstallée sur son siège et regardait de nouveau le jeune inconnu assis près d'elle. Il ne comprenait peut-être pas ce qu'elle voulait dire. Après tout, il ignorait qu'elle fuyait quelqu'un, mais il le comprendrait surement bientôt en la voyant agir. Elle s'était légèrement renfoncée dans son siège. Avec un peu de chance, son papier collant ne la verrait pas en passant et se tromperait de limousine. Les probabilités étaient plutôt faibles pour que cela se produise, mais Shaylee était prête à se raccrocher à n'importe quoi pour conserver un peu d'espoir. Elle jeta un bref regard vers la fenêtre et appuya sur le bouton pour verrouiller sa porte. Au moins, s'il se rendait jusqu'ici, il ne pourrait pas se jeter sur elle.

SHAYLEE – Ah oui. C'est ce que je croyais. Votre limousine à bien un système pour verrouiller les portières.

C'était à son tour d'afficher un petit sourire moqueur. En fait, elle voulait seulement le taquiner un peu. Elle savait trop bien que, si elle désirait obtenir ce qu'elle voulait, il lui valait mieux être sage. De toute manière, il ne lui avait pas donné de raisons pour ne pas l'être.